II. l’ionisation des aliments :
L’ionisation des denrées alimentaires est un procédé physique de conservation qui peut être utilisé comme alternative ou comme complément aux procédés classiques vus dans la première partie.
Si les premières recherches sur cette technique datent du début du siècle, les études ne débutent réellement que vers 1950. Mais ce n’est qu’à partir de 1970 que le procédé et ses conséquences sur les aliments sont étudiés de façon plus approfondie.
A) Principe de l’ionisation :
1) Définition :
Ioniser consiste à soumettre un produit à l’action de rayonnements hautement énergétiques de longueur d’onde beaucoup plus courte que la lumière (rayons X ou gamma) ou à celle de faisceaux d’électrons accélérés, dans le but de lui transmettre de l’énergie.
Sous l’effet de cet apport d’énergie, les atomes perdent des électrons et acquièrent des charges électriques : c’est le phénomène d’ionisation.
2) Nature des rayonnements :
Il existe des noyaux qui émettent naturellement des rayonnements : cette émission spontanée de rayonnements par certains noyaux instables s’appelle la radioactivité.
Les noyaux émetteurs, appelés noyaux pères, subissent une transformation, ou désintégration radioactive ; on appelle noyaux fils les noyaux résultant de cette transformation.
Et les rayonnements émis lors de ces réactions nucléaires spontanées peuvent être de quatre types :
a) Les particules α : ce
sont des noyaux d’hélium
He
émis par certains noyaux.
Plus généralement, la radioactivité α se traduit par une réaction nucléaire représentée par l’équation :
X
→
He +
Y
Noyau père noyau fils
b) Les particules β- ce sont des électrons émis par certains noyaux.
Nous représenterons l’électron par
la notation
e. Son émission est
accompagnée de celle d’une particule appelée antineutrino électronique. On la
représente par la notation
.
Plus généralement, la radioactivité β- se traduit par une réaction nucléaire représentée par l’équation :
X
→
Y +
e +
c) Les particules β+ ce sont des positrons émis par certains noyaux.
Le positron est une particule de
masse égale à celle de l’électron, mais de charge électrique opposée. Nous le
noterons
e. Son émission est de celle
d’un neutrino électronique, que nous noterons
v.
La radioactivité β+ se produit avec des nucléides obtenus
artificiellement en laboratoire. C’est pourquoi on la qualifie de radioactivité
artificielle.
Plus généralement, la radioactivité β+ se traduit par une réaction nucléaire représentée par l’équation :
X
→
Y +
e +
v
d) Les rayonnements électromagnétiques X ou gamma (γ) :
La formation de noyaux fils est généralement accompagnée de l’émission d’un rayonnement électromagnétique très énergétique appelé rayonnement X ou γ. Leurs longueurs d’onde sont de l’ordre de quelques picomètres.
Conclusion :
Dans le cas du traitement ionisant des aliments, seuls trois types de rayonnements sont utilisés :
- le rayonnement électromagnétique γ
Il est émis par un radioélément, le Cobalt 60. L’utilisation de ce rayonnement permet un traitement en profondeur (quelques dizaines de cm pour un produit de densité 1) avec des temps de traitement relativement longs de l’ordre de l’heure.
- les faisceaux d’électrons (rayonnement β-)
Ils sont produits par une machine électrique, l’accélérateur d’électrons, constitué d’une source d’électrons, d’un tube accélérateur et d’un système de mise en forme du faisceau d’électrons.
Ils ont une faible pénétration, mais les temps de traitement sont très courts.
- le rayonnement électromagnétique X
Il provient également d’un accélérateur d’électrons par interaction du faisceau d’électrons avec une cible de conversion en tungstène ou tantale. Il est moins utilisé, mais il a des performances comparables à celles du rayonnement gamma.
3) Energie des rayonnements ionisants :
L’énergie des rayonnements utilisables dans l’industrie agroalimentaire est limitée à 5 MeV pour le rayonnement électromagnétique et à 10 MeV pour les faisceaux d’électrons.
(1 MeV = 1.6.10-13 joule).
Compte tenu de leur nature et de ces limitations en énergie, ces rayonnements ionisent les atomes par perte d’électrons, mais ne peuvent en aucun cas perturber les noyaux des atomes.
Il n’y a donc pas d’activation du noyau, donc pas de radioactivité induite dans la matière ionisée (pas d’émission d’un rayonnement).
Le schéma ci –contre illustre la différence entre une ionisation et une radioactivation (source : documentation AERIAL)
Les utilisations du rayonnement dépendent directement de la dose d’ionisation et du temps d’exposition devant la source de rayonnement.
La dose D est la quantité d’énergie absorbée par unité de masse du produit traité :
D = E
M
D = dose déposée dans l’élément de matière ; E = énergie absorbée ; M = masse de l’élément de matière
La dose est exprimée en Gray (Gy), 1Gray correspondant à une énergie absorbée d’un joule par kilogramme de produit traité. Dans l’agroalimentaire, les doses sont habituellement comprises entre 0.01 et 10kGy.